Sur l’île de Beauté, les rubans d’asphalte se tordent comme des serpents noirs à flanc de montagne. Un décor de carte postale pour les touristes et un enfer pour les châssis mal nés. C’est là, sur les spéciales mythiques du Tour de Corse, que nous avons pris le volant du Skoda Elroq RS, version survitaminée du petit SUV électrique tchèque.
Six mois à peine après le lancement du modèle classique qui fait figure de nouvelle référence, Skoda dégaine la version RS. Un choix logique puisque l’Elroq s’est vite imposé comme le chouchou du marché des SUV électriques en Europe, et il fallait bien lui offrir une touche d’émotion, de sportivité avec le badge RS. Sur le papier, la recette a tout pour plaire avec deux moteurs électriques pour une puissance de 340 ch, une transmission intégrale avec un moteur sur chaque essieu, un châssis abaissé de quelques millimètres et un look franchement plus agressif. À bord, l’habitacle reste fidèle à la philosophie Skoda en étant soigné, spacieux, intelligemment conçu. Les sièges baquets en suédine maintiennent bien sans sacrifier le confort, la finition est impeccable, et le grand écran central se montre réactif et intuitif. Les touches RS avec les surpiqûres, les inserts sombres, le volant sport, apportent juste ce qu’il faut de sportivité sans tomber dans la caricature. À l’arrière, l’espace est royal et le coffre de 470 à 1 580 litres, confirme la vocation familiale et son sens pratique. On se sent vraiment bien à son bord.
Un châssis affûté au tempérament policé
La plateforme MEB, commune aux Volkswagen ID.4 GTX et au Skoda Enyaq RS, sert de base, gage de sérieux et de rigueur. Mais sur la route, surtout en Corse, la théorie ne suffit pas car les virages, eux, ne pardonnent rien. Sur les « grands axes » à la sortie d’Ajaccio en direction de Cargèse, l’Elroq RS glisse dans un silence quasi monacal, suspension pilotée en mode Normal. Mais dès que la route se resserre, le SUV de plus de deux tonnes révèle ses limites physiques sur les lacets et routes très sinueuses en direction de Corte qui passent par le Monte Rotondo. La caisse suit, la motricité est exemplaire, mais l’émotion reste en retrait. La direction, bien calibrée, manque un peu de retour d’info alors que le freinage, puissant mais au dosage capricieux, demande de l’anticipation sur ces descentes sans pitié. Ce n’est pas que l’Elroq RS ne sait pas tenir la cadence, il le fait avec brio d’ailleurs, mais il le fait avec trop de sérieux, sans fougue, sans « folie ». On le sent taillé pour la grande traversée continentale, pas pour la conduite au millimètre d’une route corse au revêtement dégradé.
Des performances propres… trop cliniques
L’Elroq RS envoie fort en exécutant le 0 à 100 km/h en 5,4 secondes et en catapultant les occupants d’un virage à l’autre avec des relances musclées offertes par les 679 Nm cumulés, dont rien que 545 Nm sur le train arrière. Mais encore une fois, tout est lisse et trop linéaire avec une poussée hyper franche mais hyper contrôlée. Du coup, le chrono est là, les freins fument, mais pas la sueur car si l’Elroq RS enroule les virages comme sur un rail, propre, efficace et quasi clinique, il n’engendre pas de désordre en sortie de virage, juste histoire d’avoir un soupçon d’adrénaline, mais par contre qu’est-ce qu’il va vite.
Et finalement on en pense quoi ?
Sur les spéciales du Tour de Corse, le Skoda Elroq RS a prouvé qu’il était diablement efficace, confortable, sûr… mais pas déluré. Il a la puissance, la rigueur et la polyvalence. Ce qu’il n’a pas, c’est ce petit grain de folie, ce frisson mécanique qui fait lever le poil sur les avant-bras. L’Elroq RS est raisonnable, précis et rassurant, mais pas un sportif pur jus, mais sur les routes corses, il a au moins prouvé qu’il savait tenir la trajectoire et sa promesse du bon compromis entre performance, confort et usage familial, sans jamais tomber dans l’excès.